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Le bagne des îles du Salut, Guyane française

Quelle étrange sensation que de parcourir ces vieilles ruines en imaginant la quinte de toux désespérée d'un bagnard malade depuis le fond de sa cellule, des chaînes lourdes qui râclent le sol humide, le grésillement métallique du trousseau d'un gardien qui s'agite sur une porte ou encore l’éternel martèlement des outils sur les pierres et les arbres. Ces bruits imaginaires et lointains peuplent encore les ruines du bagne des îles du Salut pour ceux qui s’intéressent à l’histoire - peu glorieuse - de ces établissements pénitenciers qui ont vu passer quelques 7000 forçats.

Ce bagne a été créé en 1852 sous Napoléon III pour y déporter récidivistes, évadés et opposants politiques. Il se développera sur les trois îlets en différents complexes et restera actif jusqu’en 1946 avec le rapatriement des derniers condamnés en 1953. Aujourd’hui, l’archipel est l’attraction touristique principale en Guyane française où œuvre le CNES pour la remise en état progressive de ce patrimoine historique et culturel.

J'ai pu découvrir de nombreuses facettes de son histoire lors de mon séjour sur l'archipel, à la fois plongée dans une végétation tropicale luxuriante et entourée de courants marins très forts, entre soleil de plomb et une tempête orageuse qui avait balayé l'île royale toute la nuit. 

Parmi les sites qui ont retenu mon attention, il y a la reconstitution à l'identique de la cabane de Dreyfus sur l'île du Diable. Elle est interdite à la visite car la traversée de la mer est trop périlleuse (plus d'histoire et de détails par ici: https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%8Ele_du_Diable). Les quatorze cahiers écrits par Alfred Dreyfus sont d'ailleurs éloquents sur les conditions de vie et les aléas du climat qu'il du supporter pendant plus de quatre années (des extraits sont à découvrir ici: https://www.cairn.info/revue-cahiers-sens-public-2009-3-page-93.htm).

L'île Saint-Joseph révèle quant à elle un système pénitencier extrêmement dur, avec la mise en place du régime de la réclusion cellulaire. Il s'agit de l'enfermement cellulaire jour et nuit, dans un isolement total et un silence absolu. Les cellules ne disposaient pas de plafond, ce qui permettait une surveillance constante par le biais d’un chemin de ronde situé au-dessus des cellules (plus d'histoire: https://www.inrap.fr/les-iles-du-salut-au-temps-du-bagne-15077). Un certain malaise se dégage lorsque l'on parcourt aujourd'hui ces couloirs, dans une chaleur étouffante, une humidité dense, parmi les nuages de moustiques et les toiles d'araignées. Je soulignerai aussi la proximité troublante qui existe entre les bâtiments abritant les cellules des prisonniers avec les bâtiments administratifs et les logements des surveillants. Des tombes de femmes et d'enfants dans le cimetière des résidents de l'île témoignent notamment de la présence des familles des surveillants qui ont dû s'accoutumer malgré elles à cet environnement si différent de la métropole. 

Alizée de Vanssay, 17.04.2023

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